vendredi, juillet 06, 2007

Je me souviens, j'étais petite...





Je me souviens, j'étais petite. Je regardais au loin de ce haut balcon. Je me sentais grande. Je me sentais privilégiée d'être à cet endroit où personne n'allait. Seule, pensive et innocente, je dessinais, je rêvassais. J'adorais me retrouver à cet endroit où je pouvais apercevoir tant de choses : la nature, mon chalet, les chalets de mes tantes, le lac, le chemin...

La dernière fois que je m'y suis retrouvée, j'ai pleurée. Pleurée encore et encore dans un silence. Je me rappelais cette image que je voyais devant moi. Cette image que j'aimais tant voir lorsque j'étais une enfant. C'était pour moi un refuge, un endroit inusité où le vent venait me parler, là où petite, j'aimais tant me cacher.

Vous ne pouvez pas comprendre ce que j'essaie d'expliquer. Vous ne pouvez pas comprendre les sentiments en moi, ceux qui m'ont habité lorsque j'étais assise là à contempler de mes yeux ce que j'aimais tant. Ses souvenirs sont si forts. Le 17 juin dernier, lorsque je me suis retrouvée assise à cet endroit, je me suis mise à pleurer comme une enfant, sachant que plus jamais je ne reviendrais m'asseoir à cet endroit magique. Plus jamais, je ne pourrai aller confier mes secrets et mes peines à mes arrières-grand-parents, dans cette chaise extérieure où je me suis si souvent bercée avec eux. Plus jamais je partirai en pyjamas tard le soir afin d'aller chez eux pour prendre une tasse de bouillon de poulet chaude avec des milliers de biscuits soda. Plus jamais je ne me cacherai dans les petits espaces de rangement dans les murs que je trouvais si mystérieux. Plus jamais je dormirai dans le lit voisin de mes arrières-grand-parents où je les entendais ronfler si fort. Plus jamais je ne verrai ses meubles, ses anges aux murs, ses portes, ses fenêtres, cette belle vue du haut de la maison !!!

Mes arrières-grand-parents ont pris la décision de déménager dans un condo où ils auront des soins à leurs dispositions et par conséquence une maison en moins à s’occuper. Trop âgés, devenus maintenant trop malades, ils partent vivre dans une «communauté» où les souvenirs sont toujours dépoussiérés, là où les gens sont trop souvent abandonnés et oubliés. Je me souviendrai toujours du jour où j’ai entendu mon arrière-grand-père jurer qu’il mourrait dans sa maison. Et, pourtant !

Lorsque je l’ai vu dire un dernier au revoir à sa maison j’ai eu un sentiment de malaise, un sentiment de peine inexplicable, une honte innombrable, un tourment inexplicable. Je suppose que pour un instant, j’ai partagé les mêmes sentiments que lui.

Je ne comprends pas la vie, je ne comprends pas l’existence, comment pourrais-je donc comprendre la vieillesse et la mort ?

J’ai tant pleuré cette fin de semaine du 16-17 juin. Et toute ma jeunesse, j’ai tant pleuré sur cette chaise berçante, sur ce balcon, sur ce cœur tendre de mon arrière-grand-mère. Cette fin de semaine là, j’ai pleuré pour toutes ses larmes versées dans le passé et pour toutes celle que je n’aurai pas la chance de verser à cet endroit dans le futur.

Je ne peux m’imaginer cette maison sans eux. Et je répète, je ne peux accepter la vieillesse. J’ai passé plus de 2 200 jours dans cette maison à raconter mes histoires et à écouter les leurs. J’ai peur, si peur à la prochaine fois où je passerai devant cette maison et que j’apercevrai tous les changements, toutes ses nouvelles gens. J’essaie d’accepter comme une adulte raisonnable mais c’est mon cœur d’enfant qui ne veut céder…

Ce 17 juin 2007, j’ai abandonnée derrière moi une petite fille sur un balcon, une petite fille qui pleurait et qui avait tant de souvenirs. Je l’ai laissé là avec le vent, en espérant qu’elle ne m’en voudra pas. Et un jour j’irai la retrouver, lorsque je serai moi-même devenu vent.

4 commentaires:

Joe a dit…

:*(

Roxy a dit…

Finalement, cetait pas une bonne idée de lire ce post a la job! :'(
Je pensais que tes grand-parents vivaient la aussi??!!

France De Designer a dit…

Oui mes grands-parents vivent là aussi :) Mes tantes aussi d'ailleurs. Elles s'occupaient le plus souvent possible d'eux (à chaque jour en vérité). Maintenant, elles trouvent bizarres de ne plus avoir leurs parents près d'elles...Moi, je trouve ça dur qd j'y retourne et que je les vois tous... sauf mes arrières-grands-parents, ça me fait vraiment beaucoup de peine. J,avais l'habitude de dire «je vais aller voir mes grands-parents avant de partir». Maintenant je le dis encore mais sans me rendre compte qu'ils sont plus là... c'est l'habitude. Quand je me rends compte, je viens le coeur tout bizarre et je ne peux m'empêcher de regarder du coin de l'oeil leur chalet, leur maison, là où ils ne sont plus... Enfin, c'est une étape de la vie à affronter quoique je trouve ça terriblement difficile.

Stevus a dit…

Ton texte est très touchant et je t'envoie un gros calin. Cette maison semble magnifique, j'espère que tu en gardera les plus beaux souvenirs...